En vingt ans, de quelques cas isolés, identifiés d'abord à Los Angeles, à New York, à Paris, à Amsterdam mais aussi à Kinshasa (Zaïre), le VIH est devenu mondial,infectant 58 millions de personnes, provoquant la mort de 22 millions d'entre elles. «Aucune frontière n'a pu empêcher le virus de passer par-dessus», selon l'expression de l'ONU-Sida. Et pourtant, s'il y a bien un virus au départ, il n'y a pas une épidémie uniforme et cohérente. Ce sont mille et une épidémies qui ont construit la pandémie actuelle. Chacune allant à sa vitesse, rencontrant des obstacles variés (sociologiques, économiques, virologiques), chacune ayant sa propre histoire.
Mobilisation en Occident
Si l'épidémie est née en Afrique, c'est aux Etats-Unis et en Europe qu'elle est d'abord identifiée. On a du mal à imaginer le choc aujourd'hui. Quoi, une épidémie à l'heure des antibiotiques triomphants? Aux Etats-Unis puis en Europe, ce fut la stupeur d'abord, l'incrédulité aussi, puis la mise en route en 1983 d'une extraordinaire machine à résister. On peut se gausser aujourd'hui du déni de la communauté gay au début de l'épidémie, mais alors que l'on était en pleine explosion de la révolution sexuelle, les gays, puis le reste de la population, vont peu à peu développer un modèle d'adaptation reposant sur la liberté de chacun, avec, entre autres, la politique du safer sex (sexe sans risques). Pour la première fois, une épidémie est gérée loin du modèle contraignant des précédentes, qui reposait sur l'isolemen