Un portail en ferraille barre la passe de Khyber : le poste de Torkham, porte de l'Asie centrale, ultime verrou sur la route qui relie Peshawar à Kaboul. Dernier contrôle des documents, vérification des visas. Nerveux, un garde-frontière pakistanais ouvre enfin les vantaux rouillés. L'attente a été longue, les tractations épuisantes. Il fait nuit noire quand entrent en Afghanistan les premiers journalistes invités par les talibans depuis le lancement des frappes américaines.
Haie d'honneur. Un comité d'accueil nous met immédiatement dans l'ambiance. Quelque 200 combattants en tenue traditionnelle, longue chemise bouffante et turban noir, forment une haie d'honneur de part et d'autre de la route. Armés de fusils d'assaut, harnachés de roquettes antichars, ils sont regroupés en petites phalanges autour de leurs pick-up. D'un seul mouvement, les soldats cernent notre minibus. Ici, c'est la guerre. Un mufti ramasse les passeports. Atiq Ullah, un jeune mollah chargé de la culture et de l'information au gouvernorat de Jalalabad, se lance dans un discours de bienvenue sous forme de fermes recommandations. «Ne vous éloignez jamais du groupe. Ne descendez jamais du bus sans autorisation. Ne travaillez jamais sans escorte. Sinon, nous ne pourrons pas garantir votre sécurité. Le peuple afghan est très en colère contre les médias étrangers et les Américains.» Le groupe de 22 journalistes sélectionnés par les talibans est formé pour moitié de Pakistanais représentant les grandes télévisio