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Libération
Interview

«La quête du martyre s'est propagée»

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Entretien croisé avec Gilles Kepel et Farhad Khosrokhavar.
publié le 19 novembre 2001 à 1h40

Oussama ben Laden et le mollah Omar, le chef suprême des talibans, dont le régime s¹est effondré tel un château de cartes, ont tous deux proclamé le jihad contre les «infidèles» américains. Ces appels, qui n¹ont guère mobilisé les masses musulmanes comme ils l¹espéraient, renvoient à une conception du jihad en pleine évolution. A l¹instar de l¹exemple chiite iranien, le «martyre» est de plus en plus présent dans le monde sunnite, majoritaire, en raison des crises profondes qui sévissent dans la plupart des pays arabes et musulmans.

Deux spécialistes du monde musulman, Gilles Kepel (1), professeur à l'Institut d'études politiques de Paris et responsable du programme doctoral sur le monde arabe, et Farhad Khosrokhavar (2), enseignant à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, débattent sur la notion de jihad à la lumière des événements d'Afghanistan.

Que dit le Coran du jihad?

Gilles Kepel. Jihad, en arabe, signifie l'effort, celui que l'on fait sur soi-même pour être le meilleur musulman possible. C'est le jihad que pratiquent les mystiques. Mais ce terme peut aussi signifier l'effort pour propager l'islam. On distingue alors deux types de jihad: le «jihad offensif» d'abord, où des musulmans attaquent un territoire non musulman. C'est une obligation qui concerne seulement le commandeur des croyants ­ le chef de la communauté ­ et les combattants. Le «jihad défensif» ensuite: il est beaucoup plus important car c'est une obligation de chacun quand l'Oumma ­ la communauté de