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Libération
Éditorial

Vexations

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publié le 26 février 2002 à 22h23

Ni prisonniers de guerre ni prévenus, les détenus de la base américaine de Guantanamo Bay ne relèvent d'aucune catégorie de droit connue. Leurs conditions de détention, révélées après que les autorités américaines ont été obligées d'entrouvrir la porte du camp, restent inférieures à ce qu'exigeraient les traités internationaux, mais aussi la norme morale implicite des démocraties libérales. A cet égard, l'incertitude juridique quant à la situation des détenus ne peut jouer en faveur d'une interprétation discrétionnaire de celle-ci par les Etats-Unis. Il existe en effet un «corps de principes pour la protection de toute personne placée sous quelque forme que ce soit de détention ou d'emprisonnement» qui a été adopté par l'Assemblée générale de l'ONU. La détention prolongée d'individus dans des cages exiguës exposées aux intempéries et à la canicule ne correspond certainement pas à cette norme minimale.

Certes, ce texte de l'ONU n'a pas de valeur contraignante. Mais on constate, une fois de plus, le fossé qui sépare les sensibilités européenne et américaine quant au règne de l'ordre et l'étendue des châtiments d'éventuels coupables. Le traitement des détenus de Guantanamo Bay s'inscrit dans le prolongement d'un hiatus déjà perceptible, par exemple à propos de la peine de mort ou de la lourdeur des condamnations pénales outre-Atlantique.

En outre, la surdité, et même l'agacement, des autorités américaines face aux états d'âme de leurs alliés découle de la situation paradoxale qui