Un sentiment diffus de blocage. Retraites, Education nationale, SNCF, ministère des Finances, autant de réformes amorcées, et en grande partie avortées. De quoi alimenter la rengaine des contempteurs de la sphère publique : investisseurs anglo-saxons qui martèlent depuis des années que la France est incapable de «réformes structurelles» (traduction du jargon libéral : moins d'Etat, moins d'impôts) ; usagers ballottés entre sympathie spontanée pour les fonctionnaires en grève et critique du mauvais fonctionnement des services publics ; droite hexagonale qui, en campagne électorale, affiche son mépris de l'Etat, quitte à en cautionner les errements lorsqu'elle exerce le pouvoir. Dans sa déclaration de candidature à l'Elysée, Jacques Chirac n'a pas omis le couplet sur la nécessaire «redéfinition des fonctions de l'Etat». Dans la bouche de ses lieutenants, cela donne : «L'Etat doit lâcher les baskets des Français.» La formule est d'Alain Juppé. C'est la saison des incantations qui revisitent le slogan du Medef sur «la France qui freine», réfractaire à la «modernité».
Solidarité nationale. A gauche, la gêne est palpable. A l'instar du débat sur la sécurité, qui a lui aussi pour terreau un «sentiment de malaise», il s'agit d'appeler aux réformes sans renoncer à ses valeurs. Laurent Fabius, ministre de l'Economie, décline à l'envi la bonne vieille distinction entre «moins d'Etat» et «mieux d'Etat». Quant à Lionel Jospin, «il défend l'idée d'un Etat régulateur et garant de la solidar