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Libération
Éditorial

Chats gris, souris grises

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publié le 12 mars 2002 à 22h34

Pour le meilleur, mais aussi pour le plus problématique, l'opinion des jeunes Français à l'égard de leurs concitoyens juifs reflète les valeurs d'une société démocratique et libérale. Le respect de l'autre, en tant qu'il est porteur d'une particularité inaliénable, y domine tout autre critère de jugement et peut assez facilement être corrélé avec la propre revendication d'autonomie des questionnés. On en retiendra en particulier que les jeunes d'ascendance maghrébine s'inscrivent globalement dans cette tendance.

La relative indulgence montrée par l'échantillon interrogé pour les thèses négationnistes, c'est-à-dire pour un antisémitisme à peine masqué, peut paraître contradictoire avec cet horizon dégagé. On peut mettre en cause une défaillance de la transmission scolaire à propos de la Shoah, ce qui mériterait pour le moins d'être confirmé par des recherches ad hoc. On peut surtout se demander si cela ne tient pas essentiellement à un défaut de reconnaissance de la notion d'objectivité en tant qu'elle est normative et qu'elle s'impose à tous, indépendamment de toute considération sociale ou sentimentale. L'égalité de toutes les personnes telles que leur tradition et leur culture les ont faites est étendue indûment à une sorte d'équivalence de toutes les opinions ou croyances, indépendamment de leur contenu et de la validité intellectuelle de leur élaboration. Le subjectivisme régnant, qui implique une conception égalitaire de la société, débouche sur un relativisme où tous le