Les électorats qui peuvent donner la victoire à Chirac ou à Jospin se recoupent partiellement dans la zone médiane du spectre des opinions. Il importe peu que les candidats ne s'identifient qu'imparfaitement à cette frange des électeurs, ils ne peuvent les ignorer puisque sans eux aucun succès n'est possible. De là l'effet de ressemblance des projets des deux candidats. Mais Robert Hue a tort de dénoncer une «dérive centriste» de Jospin : il s'agit au contraire d'un invariant politique dont Mitterrand, par exemple, a été un brillant manipulateur. Les piètres sondages de Bayrou sont le dernier avatar d'une vieille fatalité : le centre est introuvable et donc omniprésent !
Cet effet centripète ne s'exerce pas moins sur la droite, travaillée de façon récurrente par ses problèmes d'identité. La fin de l'hypothèque communiste avec la chute du mur a fait imploser le PCF, mais elle a aussi privé la droite de son meilleur faire-valoir, voire d'une part de sa raison d'être. Depuis, ce n'est pas de débats que manque la politique française, mais de conflit. Or celui-ci ne se décrète pas à plaisir et comme pour rehausser le piquant d'une campagne électorale. Choisir le possible, c'est accepter de voir ses choix circonscrits à un nombre restreint d'hypothèses. Pourtant, si Chirac et Jospin sont mitoyens, ils regardent en direction opposée : sans perdre le centre, il leur faut rallier très loin à droite ou à gauche et, du coup, leur ligne de front est dangereusement étirée.
Nombreux sont ce