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Analyse

Comment l'impensable est arrivé

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Les électeurs ont refusé un scénario écrit d'avance.
publié le 22 avril 2002 à 23h06

Ce n'est pas un premier tour, c'est un cataclysme. On savait les Français joueurs, on les découvre flambeurs. Flambeurs avec la démocratie. Cela s'appelle jouer avec le feu. Ou jouer au con, comme on veut. Dans les deux cas, la gueule de bois, ce matin, est terrible. La France est à l'index, montrée du doigt, la honte des démocraties. La France des lumières, celle qui aime faire la leçon à l'Autriche et à l'Italie, se retrouve avec une extrême droite «raciste, antisémite et xénophobe», selon les mots d'Alain Juppé, au deuxième tour de l'élection phare de la Ve République. Elle croyait en avoir fini avec elle, à la faveur de la reprise économique et de l'explosion du FN en 1998. L'extrême droite n'a jamais été aussi forte, au point de prendre la place de la gauche en finale de la course à l'Elysée. Comment cet impensable est-il devenu possible ? Les causes, multiples, se sont additionnées pour permettre cette dérive extrême-droitière sans précédent depuis la Libération (1969 avait vu s'affronter deux candidats de droite, nuance).

1. La cohabitation, fautrice d'abstention et de protestation. La logique institutionnelle voulait que s'affrontent au deuxième tour le chef de la droite et le chef de la gauche. Le fait que ces deux-là cohabitent depuis cinq ans a contribué à donner le sentiment aux Français que le scénario de l'élection était écrit. D'autant que les deux hommes, d'entrée, ont entamé une campagne de deuxième tour, avant que Jospin soit obligé de rectifier le tir. A dr