C'est ça. Cette chose inhabituelle, ce son étranger à la ville qui lui donne aujourd'hui une autre épaisseur, ce sont les Klaxon. Avant même le début du match, ici, là, des automobilistes s'interpellent pour rien, offrant à Paris une résonance orientale. Il est 13 h 15, vendredi. Au café l'Alliance, métro Stalingrad, dans le nord-est de la ville, la télévision parle encore de cheval. Onze partants dans la 1re à Auteuil, pour le trio de 13 h 45. «Quand j'ai rêvé d'un cheval la veille, je le joue», dit un parieur.
Au restaurant Le Sénégalais, rue de Tanger, la longue table est occupée par des Français. Dix convives ? Dix mafés. Un superbe boubou derrière le bar. Quatre Africains seulement. «C'est émouvant quand même», dit l'un d'eux quand l'hymne sénégalais résonne. Les deux équipes sont applaudies à égalité. «Diop, mon chouchou», chaloupe une serveuse porteuse de bière, en apercevant le visage du joueur sénégalais.
«Arabe africain». Une laverie, rue de Château-Landon. Dans la boutique vide, un homme âgé range avec précaution son maigre linge dans le tambour d'une machine fatiguée. Il est marocain. Pour le match, il ne sait pas trop. Alors «la France», pour faire plaisir. Un type remonte la rue déserte ; il marche seul, téléphone à l'oreille. «Non, je peux pas, là ; je suis avec des potes.» Lycée Colbert, quelques instants après. Un jeune surveillant embarrassé, souriant, mais ferme. Ici, pas de télé. «Vous savez, on a quand même un bac en préparation.» 13 h 55, caserne des pomp