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Libération

Kurdes nés en Syrie, niés en série

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Aucun droit, de père en fils, pour des dizaines de milliers de familles.
publié le 10 août 2002 à 0h38

Pendant les quelque trente ans où il a vécu en Syrie, son pays natal, Ali (1) n'a jamais eu d'autre document d'identité qu'une feuille jaunâtre avec tampons, certifiant seulement qu'«il ne figure pas sur le registre d'état civil des Arabes syriens». Ce jeune Kurde aujourd'hui réfugié en France a toujours été considéré par les autorités de Damas comme «un étranger non ressortissant d'un pays étranger». Une définition qui en faisait une espèce de non-être privé de tous ses droits. «C'était comme être assigné à résidence dans mon propre pays», raconte le jeune homme né sans papier d'un père lui aussi sans papier. Et ses trois enfants étaient aussi sans papier. Entre 600 000 et 1 million de Kurdes syriens (sur un total de 1,5 million), vivent dans cette situation, notamment dans le nord-est. Beaucoup tentent par tous les moyens de quitter un pays où ils n'ont aucun avenir. Ainsi, la plupart des 900 émigrants arrivés en février à bord du East Sea, échoué au large de Saint-Raphaël (Var), étaient des Kurdes syriens, même si à l'époque tous affirmèrent venir d'Irak. Ils craignaient d'être renvoyés en Syrie.

Alibi. La tragédie de ces Kurdes déchus de leur nationalité il y a quarante ans, a longtemps été ignorée des pays occidentaux pour qui il n'y avait pas de problème kurde en Syrie. Des dizaines de milliers de Kurdes vivent effectivement sans problème à Damas depuis des décennies. «Parfaitement assimilés, ils servent d'alibi au régime», souligne Hassan, un intellectuel originaire du