Ni la «question turque», ni les revendications polonaises n'auront enrayé la mécanique de l'élargissement de l'Union européenne. Les Quinze seront Vingt-Cinq d'ici à 2004, sauf accident référendaire dans un des pays membres ou candidats. Et la Turquie attendra. Son forcing, relayé par des Américains désireux d'ancrer Ankara dans la «coalition» antiterroriste et anti-irakienne, a agité le sommet de Copenhague, et ouvert un débat nécessaire. Mais, avant même de s'attaquer à ce dossier, l'Europe va devoir relever un défi tout aussi redoutable celui de l'intégration économique, sociale et politique des dix nouveaux adhérents. La marche forcée à l'élargissement a multiplié les risques de paralysie institutionnelle. On a vu à Copenhague les représentants de la Pologne, et d'autres pays candidats, revendiquer haut et fort, avant même d'être admis au club, leurs «droits» souvent compris, dans la meilleure tradition de la cuisine européenne, comme leur «dû», calculé en euros.
Le pire, au lendemain de cette journée historique, serait de prétendre que rien n'a changé, hormis la taille des problèmes. Tout aussi grave serait d'accepter comme un fait accompli l'idée selon laquelle le projet européen doit, du seul fait de l'élargissement, changer radicalement de nature.
La pression des Etats-Unis pour l'adhésion de la Turquie, tout comme la posture du Royaume-Uni partent d'une vision qui limite l'UE à une fonction purement économique, incapable de définir des intérêts politiques communs.