S'engager contre la guerre en Irak... L'extrême prudence a fait place, chez les intellectuels français, à des prises de position nombreuses, même si en ordre dispersé. Le 18 janvier, première journée de manifestations contre la guerre, les cortèges français avaient fait piètre figure à l'échelle européenne, et la pétition «Pas en notre nom» commençait tout juste à faire tâche d'huile. Depuis, appels, tribunes et textes contre la guerre ont paru dans la presse, l'Humanité, Marianne, Télérama, le Monde, le Nouvel Observateur, Libération, d'où se dégagent six arguments principaux.
On ne manifestera pas pour Saddam
Ce sont les plus sceptiques sur le mouvement antiguerre, mais à part de très rares exceptions (Romain Goupil), aucun n'a été jusqu'à promouvoir une «guerre au dictateur» au nom du «devoir d'ingérence» qui avait, par exemple, prévalu contre Milosevic. Ils ne descendront pas dans la rue, craignant un confusionnisme pro-Saddam et une dérive antiaméricaine. Pascal Bruckner a lancé aux pacifistes (le Monde du 4 février) : «Un petit conseil pour leurs prochaines manifestations : qu'ils réclament tous le départ de Saddam Hussein, la solution la plus sage et la plus économique en vies humaines.» C'est l'attitude unilatérale de Bush qui empêche cette mouvance «interventionniste» (Finkielkraut, Glucksmann, BHL, Kouchner, Hassner...) d'adhérer à une politique de guerre : pacifisme par défaut, faute de mieux, puisque «nous n'avons aucune confiance dans George W. Bush, qui se targue