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Libération

Bras de fer victorieux

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Retour à l'écran du journaliste menacé d'expulsion de Bagdad.
publié le 7 avril 2003 à 22h38

«J'ai vu les images que vous ont données les Américains. Il faut que vous disiez au monde : ce n'est pas la banlieue de Bagdad ! Ces images ont été tournées à Abou Ghreib, distante de 30 à 40 kilomètres de la capitale, où nos forces encerclent les impérialistes. Donc, je vous prie de rectifier. Car l'ennemi essaie de tromper le monde afin de cacher qu'il a été écrasé à l'aéroport comme ailleurs.» Sanglé dans son uniforme vert olive devant le dôme d'une mosquée de Bagdad, le ministre irakien de l'Information, Mohamed Saeb al-Sahhaf, enrage de ne pouvoir retourner d'un geste la représentation de la réalité perçue par les millions de téléspectateurs arabes d'Al-Jezira. A peine finit-il de parler, la chaîne diffuse des images prises depuis la tourelle d'un char américain montrant les abords de l'aéroport et les restes calcinés de véhicules militaires irakiens le long des routes. «Qui croire ? s'interroge le présentateur. Les discours irakien et américain sont au fond semblables : ils développent tous deux une propagande promettant une victoire inéluctable.» Tayssir Allouni est de retour sur l'écran d'Al-Jezira et, avec lui, la subjectivité de la population de Bagdad. Plus épuisé que victorieux, le journaliste, dont le ministre irakien de l'Information avait exigé l'expulsion immédiate, a repris son travail comme si de rien n'était. Pour protester contre la volonté de le faire taire, la chaîne avait interrompu ses correspondances depuis l'Irak. Privées des commentaires et des ima