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Libération
Reportage

Dans Bassora mis à sac

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Les pillages, tolérés par la coalition, provoquent la colère des habitants.
publié le 9 avril 2003 à 22h42

Bassora envoyé spécial

Bassora ne parle que de ça. Ne voit que ça. Ne pense qu'à ça. Non pas fêter sa libération, lundi, par les forces anglo-américaines. Mais pleurer, mardi, ce que la fin d'un régime a tout de suite libéré, avec une énergie sourde : le pillage, la mise à sac, le saccage à une formidable échelle. La chape de plomb a été soulevée et la ville du pays a plongé dans le chaos. L'insécurité n'est pas venue du haut d'un immeuble, de «snipers». L'insécurité est venue de la rue, éclipsant la liberté promise. Elle est venue de la foule, d'ouvriers, de paysans, de chômeurs, de petites frappes. Des plus pauvres : 60 % de la population de Bassora vit avec moins d'un dollar par jour. Résultat, la seconde ville d'Irak a des allures de ville fantôme, sillonnée par les colonnes de chars, et par des pick-up dont les suspensions peinent à supporter le poids des pillages.

A Bassora, l'Etat s'est liquéfié. Il n'y a plus de police, plus de justice, plus d'armée. Plus de loi. Plus de foi. Toutes les administrations sont récurées, sous les yeux des troupes anglaises, jusqu'à la moquette. L'hôtel de ville, déjà éventré par les bombardements, a été éviscéré de ses moindres câbles électriques. Le ministère de l'Information ? Une chasse à l'ordinateur. Les banques ? Tout y a été volé. Les écoles ? Touchées par les vagues d'assauts successives. Les maisons inoccupées n'ont plus rien. Les magasins qui ont survécu ont tiré leur devanture ou monté des parpaings devant leurs vitrines. La dic