Takrit envoyé spécial
Deux guerriers gardent toujours le seuil monumental du palais de Saddam Hussein. Un archer babylonien, trait bandé, surgit du pilastre de gauche. Un soldat irakien répond à cet élan, brandissant son fusil d'assaut sur la colonne de droite. Dérisoires cariatides quand les lourds huis cloutés condamnant l'accès du château gisent brisés sur le sol. A la nuit, les bombes américaines ont martelé sans relâche l'édifice. Effrayante démonstration de puissance à destination de la population de Takrit. Et leçon salutaire. Au matin d'hier, ses ultimes velléités de résistance avaient disparu.
Dévotion. Jusqu'à l'aube, pourtant, les habitants de la ville natale du dictateur ne cachaient pas leur dévotion au raïs déchu. Sous couvert de milice d'autodéfense, censée décourager le pillage, les nombreux fidèles du régime s'étaient arrogé le contrôle sur la ville abandonnée par une armée en déroute et une police terrorisée. Partout surgissaient des cadres du parti Baas, un pistolet ou une mitraillette au côté, prompts à questionner rudement ou à menacer. Les puissantes tribus bédouines, de longue date choyées par le pouvoir, avaient mobilisé leurs troupes à la rescousse des cellules paramilitaires de type fedayin. Au total, cet amalgame de nostalgiques représentait une force assez conséquente pour convaincre l'état-major américain qu'il ne serait pas inutile de faire donner l'aviation. En guise de cible hautement symbolique, ses stratèges ont opté pour détruire le palais de