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Libération
Interview

Les «flags», source aberrante de surpopulation carcérale

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L'avis de Serge Portelli, juge aux comparutions immédiates.
publié le 16 avril 2003 à 22h51

Serge Portelli siège depuis septembre 2002 à la 12e chambre du tribunal correctionnel de Paris, qui juge les affaires financières. Une fois par semaine, il préside la chambre des comparutions immédiates.

Qui voyez-vous défiler aux audiences de comparution immédiate ?

C'est une population très dégradée. Quand je siège en comparution immédiate, j'ai un sentiment de malaise presque physique. Juger systématiquement la pauvreté, la misère, la maladie pose forcément question, et le juge ne peut éviter de s'interroger sur son rôle. Et puis je constate que le quart des affaires ne devrait pas être renvoyé en comparution immédiate car il s'agit de très petits délits. Ils mériteraient, sans danger pour l'ordre public, un classement sous condition, une médiation ou une convocation ultérieure devant le tribunal. D'autre part, je suis choqué du nombre d'interdictions du territoire qui sont prononcées, à un moment où cette mesure fait débat. Dernièrement, la voix très autorisée du ministre de l'Intérieur a proposé la restriction de la double peine, et le juge ne peut rester indifférent. D'ailleurs quand une infraction est en cours de disparition, comme l'adultère ou l'avortement en leur temps, les juges en ont toujours tenu compte. Cela devrait inciter les magistrats à être plus modérés face à la double peine, mais je constate avec étonnement qu'il n'en est souvent rien. Le plus extraordinaire, ce sont ces casiers judiciaires comportant cinq ou six interdictions du territoire, parfois défin