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Libération
Éditorial

Le spectre

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publié le 19 avril 2003 à 22h54

Jean-Pierre Raffarin célèbre aujourd'hui «l'esprit de mai» qui a enchanté la chiraquie il y a un an ; il ne devrait pas oublier le spectre d'avril qui n'a toujours pas fini de hanter la gauche. Car ce que les urnes ont délivré, ce funeste 21 avril 2002, c'est un désaveu parallèle des hommes et partis incarnant l'exercice du pouvoir. Regrets ou pas, la loi de la démocratie a séparé le camp des gagnants et celui des perdants. Si le premier essaye d'invoquer les mânes de «mai» pour soutenir une inspiration politique qui n'avait pas même recueilli 20 % en avril, le second est plongé dans une crise existentielle durable.

L'infortune du candidat Jospin peut s'expliquer sur le moment par une campagne menée en dépit du bon sens, par le papillonnage d'une partie de son électorat, reste que l'échec socialiste de ce premier tour, et accessoirement les médiocres scores des anciens partenaires de la «gauche plurielle», viennent de loin. L'émergence du vote protestataire date du milieu des années 80, le début du décrochage de la gauche démocratique d'avec ses électeurs ouvriers et employés des années 90, la prise de conscience d'une mondialisation, cadre et carcan de l'économie, s'élargit au tournant de l'an 2000. Lionel Jospin n'a pas été pour la gauche le passeur de ces grandes mutations, comme François Mitterrand réussit à être celui de son époque. Il laisse un PS plus désemparé qu'orphelin, dont les débats actuels laissent mal augurer de lendemains qui déchanteraient moins. Entre ceux