Daniel Defert, sociologue, a fondé l'association Aides en 1984. Avec Jonathan Mann et quelques autres, il a été l'un des artisans d'une conception de la prise en charge du sida centrée sur le respect des droits de l'homme.
Est-on aujourd'hui en pleine régression avec les mesures de quarantaine prises un peu partout face au Sras ?
Mon sentiment a évolué. Au début, c'est vrai, tous les acquis de la lutte contre le sida semblaient être gommés. On assistait à des scènes effarantes, avec la mise en quarantaine de tout un immeuble à Hongkong et la mise en place de cordons sanitaires. Ceci sans la moindre interrogation. Cela m'a frappé. Mais en moins d'une semaine, des éléments techniques ont été fournis. On a commencé à savoir que la cause du Sras était un coronavirus, on en a mesuré le taux de mortalité, on a découvert les voies de contamination. Et, très vite, il y a eu suffisamment d'éléments techniques pour éviter qu'on tombe dans la panique. Surtout on a pu éviter qu'on perçoive ces mesures discriminatoires comme des mesures fantasmatiques. Très vite la réponse à cette épidémie s'est basée sur des critères techniques et non pas imaginaires.
Ce qui n'était pas le cas auparavant ?
Avant, disons du temps des épidémies, les réponses autoritaires du type quarantaine, mises à l'écart, exclusion avaient parfois des justifications empiriques, mais elles reposaient surtout sur des fantasmes, des ombres de peurs ancestrales. Et c'est ainsi, pour dire vite, que s'est élaborée une gestio