La nostalgie est toujours ce qu'elle était. La nostalgie de la droite française d'avoir manqué son épreuve de force fondatrice, celle qui l'eût installé en héroïne de la réforme dérégulatrice, en modernisatrice libérale. Dans les années 80, quand est venue la mode du démantèlement de l'Etat-providence, Reagan a tenu face aux contrôleurs aériens, Thatcher n'a pas cédé aux mineurs, Chirac, lui, baissa pavillon contre les étudiants en 1986. La messe était dite et la tradition installée d'une droite forte en gueule mais prompte à battre en retraite face à la rue. On ne compte plus les projets retirés par Chirac, Juppé et Balladur. La majorité actuelle en a déduit qu'elle avait ainsi découragé son électorat contempteur de chienlit et fait le lit de Le Pen.
Raffarin veut être aujourd'hui l'homme qui rend à la droite sa fierté, qui pratique la politique qu'attendent ses électeurs, qui ne cède pas à la pression de la rue. La rédemption passe donc par les retraites. S'il tient là-dessus, Raffarin pense qu'il entrera dans l'Histoire, s'il lâche qu'il ne sera plus possible de réformer. Son talent de communicant est tel qu'il a réussi à convaincre au-delà de son camp jusqu'à un Rocard ou un Attali. Comme si l'important n'était pas le contenu d'un projet mais le fait de ne rien lâcher à ceux qui le contestent, comme s'il n'était qu'une réforme des retraites possible qui consisterait seulement à allonger la durée de cotisation des salariés quand leurs emplois se raréfient. Comme si, surtou