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Libération

«Les cadences ne font qu'augmenter»

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Nicole, 52 ans, et Nadine, 40 ans Ouvrières dans une usine de découpe de volailles
publié le 10 juin 2003 à 23h19

A 40 ans, dont vingt dans l'usine, Nadine, blouse blanche maculée de sang et filet bleu sur les cheveux, donne en moyenne 1 500 coups de couteau par heure, toujours le même, sur une escalope, ou une cuisse de dindon pour la désosser. Elle sort tout juste d'un arrêt de travail de quinze jours pour épicondylite, une inflammation du coude et du tendon, reconnue comme maladie professionnelle dans le secteur.

Gestes répétitifs, froid, humidité, bruit continuel des machines... «Le travail est physique», dit pudiquement Nadine. Et, paradoxalement, si la mécanisation a supprimé les tâches les plus ingrates, elle a aussi introduit le stress des cadences infernales. «Autrefois, il y avait seulement une ou deux personnes et elles travaillaient à leur rythme pour détailler une dinde, raconte Nicole. Aujourd'hui, sur la chaîne de découpe, il y a dix-sept femmes qui ont chacune un geste bien précis à effectuer. Et, à chaque fois qu'on installe de nouvelles machines, les cadences augmentent.» Sans parler des horaires en «deux-huit» qui obligent, une semaine sur deux, à se présenter dès cinq heures du matin en pleine forme à son poste. «Quand la chaîne démarre, tu dois être au top pour faire ton geste à la demi-seconde près, on n'a pas le choix, explique Nicole. Alors les soirées canapés devant la télé ou les loisirs, ce n'est pas pour nous.»

Payées 1 050 euros par mois après vingt ans d'ancienneté, Nicole et Nadine rêvent comme les autres salariés d'un départ à la retraite à 55 ans. Au mieux