La galette fout le camp, au propre et au figuré, le disque compact et l'argent qui va avec. Après une petite vingtaine d'années d'existence, un des plus spectaculaires succès du mariage entre l'industrie du divertissement et celle de l'électronique est entré en crise. Ce modèle est menacé dans ses dimensions techniques autant qu'économiques et les cinq trusts qui se partagent le marché mondial (la concentration des majors du disque étant encore plus forte que celle des majors du pétrole) ne cachent plus leur panique.
Commercialement parlant, la relation artistique la plus simple a lieu lorsqu'on abandonne une pièce de monnaie dans la sébile d'un musicien ambulant. Mais, parce qu'ainsi on entend rarement la musique qu'on veut au moment où on en a envie, l'intermédiation entre l'artiste et son auditeur a prospéré non sans influencer l'un et l'autre. Très tôt dans le siècle passé, l'objet disque est a été le médium incontournable des musiques populaires et de leurs évolutions, de Gardel à Presley et d'Oum Kalsoum à Madonna. En se convertissant, dans les années 80, à la numérisation, les éditeurs de musique ont à la fois touché le gros lot et scié la branche sur laquelle ils étaient assis. Le coût dérisoire du pressage d'un CD a suscité toute une industrie du faux avant que le MP3 ne fasse sauter le besoin de l'objet matériel lui-même.
Le malheur des majors ne regarde que leurs actionnaires. Ce qui compte, ce sont les deux bouts de la chaîne : le public et les artistes. Internet