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Libération
Éditorial

Le prix de la proximité

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publié le 12 septembre 2003 à 0h57

Une ministre assassinée en train de faire ses courses dans un grand magasin ! Le scénario flaire l'aubaine d'audimat pour nécrophages de la téléréalité. Mais le meurtre d'Anna Lindh, ministre de 46 ans promise au bel avenir de première femme chef d'un gouvernement en Suède, vient surtout rappeler, en marge de l'émotion, qu'il est un pays où il n'est nul besoin de songer à inventer une émission de téléréalité pour rapprocher les politiques des citoyens. Un pays où cette proximité est si bien au coeur de la démocratie qu'elle peut être tristement mortelle. La Suède a été obligée d'adapter son Etat providence à la globalisation mais elle n'a jamais remis en cause la «société ouverte» qu'elle entend être. Elle avait pourtant prétexte à le faire, elle qui a vécu, il y a dix-sept ans, l'assassinat d'un Premier ministre dont la renommée avait passé les frontières. Les successeurs d'Olof Palme ont hérité d'une protection. Pas le reste du gouvernement, pour ne pas compromettre la tradition identitaire qui refuse l'entrave entre la population et ses élus. Plutôt que de rêver à l'émission de télé miracle qui les réconcilierait avec l'opinion, les ministres de l'hexagone feraient bien de méditer sur ces latitudes où gyrophares et autres passe-droits sont proscrits, où les titulaires de portefeuille demeurent des gens ordinaires qui rentrent dormir chez eux, portent leur serviette et leur cabas pour les commissions. On y voit même les princesses héritières se promener à pied, sans protec