Takrit, Baqouba
envoyée spéciale
Un tank, un rouleau de barbelés, et trois GI plantés devant une des bases de Takrit. Ils aimaient surtout faire du shopping, quand ils ont débarqué. Télé, climatisation, DVD. De l'Irak, ils écrivaient à leur famille que c'était moins cher que le Texas. Ils avaient fini par s'habituer à «cette espèce de barbecue qu'ils mangent avec les mains» dans des restaurants carrelés comme des salles de bains où ils se faisaient photographier en uniforme sous les portraits de Saddam.
Il y a eu les premiers tirs. Fin des virées en ville, c'est un ordre. Quand le soleil tapait trop fort, il y a deux mois encore, ils poussaient jusqu'au coin de la rue, chez le petit marchand de glaces. On s'est mis à leur jeter des pierres. L'horizon s'est encore rétréci. A un mètre, de l'autre côté des barbelés, un bidon a été transformé en poubelle. Coup d'oeil à droite. Coup d'oeil à gauche. L'un part jeter sa canette vide et retourne en trottinant derrière les barbelés.
Il y a une semaine, dans le village juste à côté, deux personnes tiraient en l'air pour un mariage. Une patrouille américaine a pris peur et mitraillé la noce. Un mort. Vendredi, trois GI tombent dans une embuscade à quelques kilomètres de là. Samedi, le quartier est encerclé, rafle générale, y compris des gamins et les passagers du minibus pour Bagdad. «Je me disais que, grâce à nous, au moins les enfants pouvaient de nouveau jouer dans la rue», dit Sean. Mais l'interprète de son colonel lui a expliqué qu'il