Souvent l'Europe a été à un tournant, cette fois elle est à un croisement. L'élargissement a été un élan impérieux, il ne peut pas rester indéfiniment une fuite en avant. Si l'on veut démarrer à 25, le seul passage disponible à ce jour, que ça plaise ou non, est celui proposé par le compromis de la Convention européenne. Sinon les chemins s'écarteront entre les «historiques» de l'Union, forcément aspirés par une logique fédérale dictée par leur communauté d'intérêts, et une «périphérie» formée de pays qui adhéreront à une Union sans trop de contraintes, mais sans beaucoup de contreparties.
Que l'on retrouve dans le premier camp les pays les plus riches de l'Union, en dépit des vicissitudes du moment, ne suffit visiblement pas à convaincre les autres qu'ils auraient trop à perdre à ne pas prendre place dans le train de l'intégration. Seule l'histoire longue donne la mesure de l'avantage retiré des guerres éradiquées, des économies imbriquées et des politiques concertées, même si ce n'est jamais un chemin sans heurts. L'histoire courte des nations délivrées du communisme ne leur donne sans doute pas toujours la perspective nécessaire pour peser les concessions obligées. L'Espagne, qui fait figure avec la Pologne d'empêcheuse constitutionnelle, a en revanche la mémoire bien courte en réduisant l'Europe à un robinet qu'il conviendrait de fermer aux autres après en avoir si bien profité.
Mais à l'heure où un destin collectif peut se sceller, il est affligeant de constater à quel po