Menu
Libération
Éditorial

Rêve.

Article réservé aux abonnés
publié le 4 novembre 2003 à 1h41

Rien de plus facile que de se moquer de Matrix, comme de n'importe quelle fiction hollywoodienne parée d'oripeaux de spiritualité et de dialogues obscurs et pesants quand ils ne sont pas hilarants. Les philosophes audacieux qui se penchent sur cette «machine philosophique» courent le risque d'être noyés sous les quolibets pour avoir osé «prendre au sérieux des choses dérisoires», comme de savoir si Neo est ou non The One, le Sauveur...

Mais les batailles de Neo et des siens contre les simulacres vertigineux du monde électronique de la Matrice resteront la voie par laquelle une génération d'humains aura accédé aux figures, universelles et éternelles, du mythe. Tout comme Star Wars ou le Seigneur des Anneaux ont pu l'être, ce sont des échos abâtardis, ou modernes, des récits homériques, de la quête du Graal, du Mahabharata indien ou des aventures fantastiques des maîtres de kung-fu de la Chine. A la fois tentative d'explication et outil d'interrogation sur ce qu'il y a de mystère irréductible dans le monde qui nous entoure, les mythologies se perpétuent en se métamorphosant. Elles le font sous l'impact de technologies qui changent le réel, mais aussi la manière de l'appréhender, de le penser et de l'imaginer pour le raconter.

Dans l'univers, matérialiste et technologique du XXIe siècle, où l'individu se sent emporté dans un univers fragmenté en flux perpétuel, le succès de Matrix tient en partie à ce qu'il fait écho aux questions sur les frontières du réel et du virtuel, la natu