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Libération
Éditorial

Irresponsable

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publié le 15 novembre 2003 à 1h53

Ce n'est plus un gouvernement, c'est un état-major de campagne qui loge désormais dans les ministères. Et qui joue avec la politique sanitaire au gré de ses inquiétudes électorales. Jusqu'à remettre en cause aujourd'hui le financement d'un plan cancer, pourtant annoncé comme l'un des trois chantiers présidentiels du quinquennat, pour retrouver les grâces des buralistes qui craignent de ne plus gagner leur vie, à force d'être pris pour des marchands de mort. La dernière raffarinade en date n'est pas glorieuse. Et cela pourrait bien ajouter au tracas d'un Premier ministre dont l'opinion ne goûte plus guère les habiletés. Il n'est pas certain, en revanche, qu'elle fasse cesser l'exaspération contre le gouvernement de la part d'une France poujado qui trouvera toujours matière à critiquer l'Etat emmerdeur, empêcheur de fumer ou de rouler vite, comme si l'indice de liberté d'un peuple se mesurait à son nombre de tués sur la route ou par la cigarette. Cette France dont Le Pen a fait son fonds de commerce et sur laquelle il a réussi à prospérer jusqu'au second tour de la présidentielle, voilà que Raffarin craint de se la prendre dans les gencives aux régionales. Et si les «Français d'en bas» qu'il a tant chantés refaisaient le coup du 21 avril parce que la hausse du tabac leur a rendu plus difficile l'un des rares plaisirs qu'ils peuvent s'offrir. Au nom du combat anti-Le Pen, vaut-il mieux laisser les pauvres attraper le cancer ? Le ridicule lui au moins ne tue pas et l'on comprend