Jacques Chirac a-t-il, en l'espace d'une conférence de presse, dilapidé tout son capital de sympathie dans le monde arabe ? La question mérite d'être posée tant sa décision a suscité déception et incrédulité dans une région où le religieux est au centre de la vie sociale, voire politique. Il suffit de rappeler les propos du cheikh Youssef al-Qaradhaoui, un ouléma égyptien installé au Qatar : cette décision est «une cause de souffrance et de douleur pour les musulmans». Qaradhaoui est la référence spirituelle des Frères musulmans égyptiens, l'un des prédicateurs les plus écoutés au monde grâce à ses émissions sur la chaîne satellitaire Al-Jezira et à ses petits livres de vulgarisation traduits dans toutes les langues. «Ne provoquez pas la haine et l'inimitié des musulmans», adjure-t-il. «La France a des intérêts avec nous, et si les institutions et les dirigeants islamiques protestent, elle s'inclinera, mais personne ne se soucie plus de l'islam», regrette-t-il.
Même tollé au Liban, francophone et francophile, où sunnites et chiites accordent pour une fois leurs voix afin de protester contre le choix élyséen. Le mufti sunnite «regrette». Quant au guide spirituel du Hezbollah, le cheikh Mohamed Hussein Fadlallah, il dénonce une atteinte aux «droits de l'homme musulman». La milice chiite libanaise a toutefois pris soin de ne pas pointer du doigt la France, l'un des rares pays européens à opérer une distinction entre son activité politique et sa branche militaire.
Dans le Maghreb,