Port-au-Prince envoyé spécial
«Titid avait drainé un capital de sympathie qu'Aristide a dilapidé.» Ancien conseiller du président haïtien, l'historien Christophe Wargny dresse un triste bilan de l'homme et de son régime, bientôt treize ans après sa première élection (1). «Titid présidan !» clamait une immense foule devant le Palais national à Port-au-Prince au lendemain du scrutin du 16 décembre 1990. Aristide, le «prophète des bidonvilles», venait d'être élu avec 67 % des voix. Une page était tournée, croyait-on, dans l'histoire chaotique d'un pays qui sortait des trente ans de dictature des Duvalier père et fils, «Papa» et «Baby» Doc, suivis d'un lustre de différentes cliques militaires. Les Haïtiens voient en «Titid» un sauveur. «Les Duvalier avaient été des démons, et pour combattre les démons, il fallait... un saint. Beaucoup s'y sont laissé prendre», explique le socialiste Serge Gilles. Aristide combat les démons depuis quelques années déjà. Issu des «ti-legliz» petites communautés catholiques de base , ordonné prêtre en 1982, à 29 ans, il fustige la dictature du haut de sa chaire de la paroisse populaire de Saint-Jean-Bosco, à Port-au-Prince. Il a été la cible de plusieurs tentatives d'assassinat des Tontons Macoutes, la sinistre milice duvaliériste.
Revanche. Originaire d'une famille paysanne pauvre, il se réclame de la théologie de la libération ce qui lui vaut de sérieux ennuis avec sa hiérarchie, et notamment son exclusion de l'ordre des Salésiens , dénonce au