Menu
Libération
Éditorial

Le doigt de Bush

Article réservé aux abonnés
publié le 15 janvier 2004 à 21h59

A l'inverse du sage chinois, on est avisé, quand George W. Bush montre la Lune du doigt, de regarder ce doigt, et les motivations de celui qui le pointe, avant de rêver de nouveaux voyages de la Terre à la Lune. Le «coup» électoral que représente cette relance de la conquête spatiale, plébiscitée par une majorité d'Américains, n'échappera à personne. D'autant que Texas et Floride, Etats clés pour la réélection de Bush en novembre, vivent pour une bonne part de la Nasa et que le Président sort celle-ci de l'impasse où elle se trouvait, en raison des accidents de navettes et des limitations de la station spatiale.

Mais, en pointant la Lune, Bush a surtout en tête cet astronaute que les Chinois veulent expédier sur notre satellite après l'avoir fait voler autour de la Terre. Certes, il prend soin d'affirmer que la conquête spatiale devra être un «voyage» commun à toute l'humanité, non une «course» entre les Etats-Unis et leurs rivaux. Mais Bush aujourd'hui, comme Kennedy en 1961, a bien des motivations stratégiques. Il s'agit de perception, de prestige, mais aussi de détermination à contrôler l'espace, prochaine frontière de l'aventure humaine. Une station lunaire sera de facto une tête de pont américaine.

L'objectif Lune ne mène pas nécessairement à la guerre des étoiles, mais il est naïf en matière d'espace de vouloir séparer les visées scientifiques, civiles et pacifiques de l'effort entrepris des visées stratégiques et militaires. Il serait aussi absurde de refuser l'aventure