Beyrouth envoyé spécial
Le chant de Fairouz s'élève si haut dans la nuit qu'on dirait qu'il prend le ciel à témoin des milliers de drapeaux rouges et blancs (couleurs du Liban) qui agitent la place des Martyrs. L'opposition a aussi mobilisé les grandes voix libanaises dont les enregistrements, servis par une sono puissante, alternent avec les discours très politiques. La révolte à Beyrouth n'est pas que cris, slogans, revendications. Elle est aussi festive, heureuse, joyeuse, en contraste avec ses enjeux cruciaux.
Interdiction. A peine le ministre de l'intérieur Soleimane Frangieh avait-il prononcé dimanche soir l'interdiction de tout rassemblement que la foule commençait à dévaler des quartiers voisins sur la place symbole de la capitale, pour braver l'interdit. Déployée en grand nombre, barrant les rues du centre-ville, l'armée libanaise a fait d'abord son possible pour endiguer la crue. Au fil des heures, elle a peu à peu relâché son encerclement sans pour autant le rompre. Hier après-midi, elle faisait surtout semblant d'empêcher de nouveaux groupes de rejoindre les milliers de jeunes qui avaient passé la nuit, enroulés dans des couvertures ou des drapeaux, sur l'immense place. Elle devait intervenir à cinq heures du matin pour la faire évacuer manu militari. Mais le pouvoir a fini par reculer. Et le rassemblement n'a fait qu'enfler. Cité par l'AFP, un officier de l'armée libanaise avançait le chiffre de plus de 20 000 manifestants. La télévision LBCI les estimait à 50 000