Menu
Libération
Interview

«Chaque assaut de populisme ne fait que renforcer Le Pen»

Article réservé aux abonnés
publié le 24 juin 2005 à 2h43

Professeur de sociologie politique à l'université Paris-I, Pierre Birnbaum, spécialiste des populismes, est l'auteur du Peuple et les gros, histoire d'un mythe (Pluriel).

Désaveu des partis de gouvernement avec la victoire d'un non anti-élites au référendum, diatribes de Sarkozy contre les juges, l'air du temps serait-il au populisme ?

Nous traversons une crise d'antiparlementarisme telle que celles que la France a déjà connues à la fin du XIXe siècle, dans les années 30 ou dans les années 50 avec le mouvement Poujade. Elle se traduit par une délégitimation des partis politiques qui sont supposés ne plus entendre le peuple. Cette vision globale d'un peuple infaillible, Nicolas Sarkozy l'a formulée, mercredi encore, en lançant aux députés PS : «Vous avez oublié le peuple, vous ne parlez pas comme lui, vous ne le comprenez pas !» En France, les partis politiques ont longtemps été tenus en marge de la démocratie. Ils n'ont conquis leur légitimité que tardivement par rapport à l'Angleterre ou aux Etats-Unis. Cette évolution est renforcée par ce qui vient de se passer au PS. L'attitude de la minorité qui s'est affranchie d'un choix démocratique collectif pour prôner le non, alors que c'est le oui à la Constitution européenne qui avait été approuvé par les militants, a considérablement délégitimé les partis.

Or cette crise se produit à un moment déterminant : jusque-là, à chaque crise d'antiparlementarisme, l'Etat demeurait fort, en tant que garant de l'ordre public. Aujourd'hui, l'e