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Libération
Éditorial

Naufrage

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publié le 1er décembre 2005 à 4h45

Les jurés de la cour d'appel n'ont pas encore rendu leur verdict que l'avocat général mais aussi le procureur général de Paris ont déjà exprimé publiquement leurs «regrets» à ceux qui sont encore des accusés : du jamais vu dans les annales judiciaires, et ce au terme d'une affaire qui aura été exceptionnelle de bout en bout. «Un mille-feuille de petites erreurs, de mauvais fonctionnements, d'inattentions, une immense quête d'humanité qui n'a pas été réalisée»: de tels mots sont assez rares dans un réquisitoire pour que le procès d'Outreau reste exemplaire de toutes les erreurs qu'une justice équitable devrait éviter. Il y a plus d'un an, les excuses du ministre de la Justice à l'issue du premier procès donnaient déjà la mesure du scandale. Aujourd'hui, le nouveau garde des Sceaux devrait s'agenouiller à son tour et annoncer des réformes (deux juges d'instruction pour les affaires complexes, meilleur contrôle des détentions provisoires) pour éviter de nouveaux naufrages. Tant mieux, mais, comme le soulignent nombre d'avocats, attention : car, depuis 2002, toutes les réformes pénales ont d'abord diminué les droits de la défense et augmenté les prérogatives du parquet et de la police. Enfin, aux démagogues qui en profiteraient pour vouloir faire «payer» les juges, comme un Nicolas Sarkozy tente régulièrement de le faire, le procureur général de Paris a répondu par avance : la faillite d'Outreau est collective. Si elle préserve du lynchage le juge Burgaud, cette réponse courageu