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Libération
Éditorial

Sublime

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publié le 9 décembre 2005 à 4h53

La plus belle phrase jamais proférée dans l'idiome français compte sept mots et a été publiée le 9 décembre 1905 par le Journal officiel : «La République assure la liberté de conscience.» D'emblée, la loi qui avait cette sentence pour article premier a atteint au sublime. Tous ceux qui la détestent in petto font semblant d'en tenir le propos pour «acquis». Puissent-ils avoir raison ! Mais souvent ils butent sur l'article second, qui le cède pourtant à peine au premier en majesté et qui proclame que «la République ne reconnaît aucun culte». C'est aujourd'hui toute la question. Des néo-ultramontains aux prototalibans, ça piaille à qui mieux mieux pour que la puissance publique «reconnaisse» les «cultes» (sauf l'animiste, pourtant aussi respectable que les autres). Il faut aussi sereinement repousser un éventuel «statut des sikhs», comme il aurait fallu refuser courageusement celui des juifs. Toute la liberté à tous et aucun passe-droit à aucune chapelle : on ne fait pas plus simple et limpide que cette loi-là.

Elle appartient à un temps où la France savait être prémonitoire. Cette loi de paix civile a été gagnée, dans chacun des camps opposés, par des hommes de coeur soucieux de brider leurs talibans (Jaurès entre autres pour la gauche). Les principes (pacifiques) des Nations unies reprennent logiquement à leur compte cette séparation des Eglises et de l'Etat. Ne sent-on pas que, chaque fois qu'un ministre japonais s'en va shintoïser à Yasukuni, il contrevient à une exigence un