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Libération
Interview

«Morales veut dépasser le clivage ethno-culturel»

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publié le 21 décembre 2005 à 5h03

David Recondo est chargé de recherche au Centre d'études et de recherches internationales, à Sciences- Po. Ses travaux portent sur les processus de changement politique en Amérique latine, notamment le rôle qu'y jouent les mouvements indianistes. Son prochain ouvrage Mexique : multiculturalisme et démocratie sortira l'année prochaine aux éditions Karthala.

Faut-il voir dans la victoire d'Evo Morales en Bolivie l'effet d'un «nationalisme ethnique» ?

Les appellations «d'Indien» et «d'indianisme» sont à manier avec prudence. Evo Morales, comme plus de la moitié des Boliviens, est d'ascendance indigène ­ dans son cas d'ethnie aymara. Mais il n'a pas systématiquement mis en avant son identité culturelle au cours de sa carrière syndicale au sein de la COB (la Centrale ouvrière bolivienne) ou au MAS (Mouvement vers le socialisme), dont il est le fondateur. De ce point de vue, il se distingue donc de son rival, Felipe Quispe, dirigeant d'ascendance aymara lui aussi, fondateur du parti Mouvement indien pachakuti (MIP), dont le discours est franchement raciste, appelant notamment à la guerre contre les «Blancs» et proposant la création d'une «nation aymara» avec un Etat souverain, le Qollasuyu (du nom d'une des quatre parties de l'ancien empire inca). Morales ne vient pas non plus du mouvement «katariste» (du nom d'un dirigeant indien qui combattit les Espagnols au XVIIIe siècle) dont l'un des fondateurs, l'aymara Victor-Hugo Cárdenas, fut vice-président de la République lors du premier