«En fait, je veux reprendre une vie normale», dira-t-elle. Mais rien n'était tout à fait normal hier midi à la tribune dressée dans l'enceinte de l'hôpital d'Amiens. Il y avait là des professionnels de la profession médicale. Il y avait des carafes d'eau, des verres, et même des bouquets de fleurs. Mais c'est un bouquet de micros qui attendait la jeune femme derrière un carton où l'on pouvait lire «Isabelle D.». C'est pour elle que les médias sont venus en masse, c'est à cause d'elle que LCI a retransmis en direct cette conférence de presse sans précédent. Sans elle, on serait restés entre spécialistes et journalistes spécialisés. Mais elle était là. Célèbre et encore anonyme. La première femme à avoir eu une partie du visage greffée. Le bas. Le «triangle nez-lèvres-menton», disent les spécialistes. Jusqu'à hier midi, on ne connaissait pas officiellement son nom ni le haut de son visage.
Alors les regards, les caméras, les flashs sont avides, forcément avides, lorsqu'elle s'assoit et fait face à la salle. Et forcément, cette jeune femme aux cheveux fatigués, qui s'apprête à dire qu'elle ne s'est «jamais exprimée en public», n'est pas tout à fait dans son état normal (elle est d'ailleurs sous traitement médicamenteux). Il y a de l'effarement dans ses yeux clairs, ses yeux. Et, au milieu du visage, il y a sa bouche ouverte. Celle d'une autre, devenue sa bouche. Ouverte comme quand on est saisi de stupeur, sauf que la sienne ne se referme pas pas encore, question de temps, exp