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Libération

Une condamnation qui suscite peu d'adhésion

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La communauté juive estime plutôt que la SNCF a été réquisitionnée par l'Etat.
publié le 7 juin 2006 à 21h42

Le moins que l'on puisse dire, c'est que la décision du tribunal administratif de Toulouse condamnant l'Etat français, et surtout la SNCF, ne suscite pas une franche adhésion parmi ceux-là même qui, durant toute leur vie, ont lutté pour que soient poursuivis et jugés les responsables de la Shoah. Ils sont dubitatifs, comme Théo Klein, ancien président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), lui-même déporté. «Il m'a semblé alors que la SNCF était aux ordres des Allemands, même si c'était par l'intermédiaire de l'Etat français.» Cet ancien déporté se demande sur quelles bases historiques se fondent les magistrats pour soutenir leur jugement. «Qui par exemple a décidé d'utiliser des wagons à bestiaux. Quelqu'un à la SNCF ou les Allemands ?»

«En travers de la voie». Serge Klarsfeld, écrivain et avocat de la cause des déportés, dont le fils Arno est d'ailleurs un des avocats de la SNCF dans cette affaire, ne cache pas son hostilité à cette décision. «Bien sûr, on aurait voulu que des cheminots se couchent en travers des voies, que le directeur refuse d'obéir, qu'au minimum on n'envoie pas la facture... Mais on ne vit pas dans un monde où tout le monde est un héros.»

Pour lui, la SNCF d'alors a tout simplement été réquisitionnée. «La SNCF a-t-elle démarché les Allemands pour accomplir cette tâche ? Pouvait-elle même se soustraire ? Beaucoup de Français ont eu leur voiture, leur maison, réquisitionnées. Faut-il les condamner aujourd'hui ? C'est aberrant.»