L'émotion soulevée par la réapparition de Natascha Kampusch est à la mesure de la fascination, de la sidération, que provoque son destin miraculeux. Une fillette enlevée il y a des lustres, et que tout le monde croyait morte, assassinée, comme c'est souvent le cas en pareil crime, refait soudain littéralement surface. Une quasi-résurrection, mais pas seulement : car, bien que longtemps rayée des vivants, une enfant est devenue une femme qui doit recoller à un monde qui a continué sans elle, mais tout à côté d'elle. Prisonnière d'un bourreau humain, qui l'a «élevée» en même temps que torturée, cette captive sans visage jusqu'à hier a grandi dans l'incessante pensée de s'enfuir, et a survécu. Son histoire bouleversante a une dimension universelle. Aujourd'hui, la liberté de Natascha Kampusch passe par un affrontement brutal avec le réel le syndrome d'Hibernatus, beaucoup plus que celui de Stockholm. Depuis quinze jours, elle fait face avec cran et maturité à la curiosité du monde entier, un mélange déferlant de compassion et de voyeurisme, qui la propulse d'un isolement maximal à une exposition aussi maximale, d'une solitude absolue à une sollicitude avide, harcelante. Mais la voilà qui, tout en demandant du temps, notamment à ses parents, avec qui le lien a l'air difficile à renouer, s'adresse d'abord par une première lettre ouverte à la «chère opinion mondiale», avant de décider, entourée de son bataillon de psys et de communicants, de parler «à visage découvert»
Éditorial
S'échapper
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publié le 7 septembre 2006 à 23h12
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