Stéphane Boujnah, cofondateur du think-tank En temps réel et auteur d'un essai sur L'inoxydable modèle suédois,analyse comment ce pays fait face aux chocs de la mondialisation.
Après toutes les mutations qu'il a subies depuis les années 90, le modèle suédois mérite-t-il encore d'être érigé en exemple ?
Le modèle suédois «canal historique», à savoir l'âge d'or de la social-démocratie de Tage Erlander [Premier ministre de 1946 à 1969, ndlr] et de son successeur Olof Palme, est bien révolu. D'abord, il s'est banalisé depuis trente ans, le niveau de protection sociale en Suède étant aujourd'hui comparable, voire parfois légèrement inférieur, à celui d'autres pays européens. Ensuite, depuis 1994, les sociaux-démocrates en ont cassé le moule, avec des réformes d'inspiration sociale-libérale assez ambitieuses : la réduction de moitié de la taille de la fonction publique, un vaste programme de privatisations dans l'énergie et les transports ou le retour à la rigueur budgétaire. Enfin, le modèle prend un peu l'eau avec un sérieux problème de chômage structurel. Mais ce qui reste exemplaire, c'est un modèle de gouvernement, un type de rapports avec les citoyens qui permet de faire adhérer une société aux transformations profondes qu'exige la mondialisation. Est-ce d'ailleurs un hasard si la Suède est le seul pays européen qui échappe à la poussée du vote protestataire populiste et xénophobe, alors même que d'autres pays nordiques comme le Danemark et la Norvège en sont att