Chercheur au Centre d'études et de recherches internationales (Ceri), spécialiste du Japon, Jean-Marie Bouissou analyse les craintes provoquées par l'arrivée de Shinzo Abe au pouvoir et sa volonté de redonner au Japon une place de premier plan sur la scène internationale.
Pourquoi Shinzo Abe suscite-t-il autant de méfiance ?
Le nouveau Premier ministre japonais est perçu par les médias occidentaux de manière assez simpliste comme «le petit-fils d'un criminel de guerre» qui veut «réarmer le Japon» et «réviser l'histoire de son pays». Héritier choisi par Junichiro Koizumi, l'homme qui a enragé la Chine et la Corée par ses visites répétées au sanctuaire Yasukuni, où sont honorés les mânes des criminels de guerre pendus en 1948, Shinzo Abe ne fait pas grand-chose pour dissiper le malaise. Il a toujours proclamé sa fidélité familiale. Il s'est lui-même rendu au Yasukuni et ne cache pas qu'il veut en finir avec l'éducation démoralisante, et la culpabilité masochiste inculquée, selon lui, aux petits Japonais par l'histoire, telle qu'on l'enseigne à l'école depuis la défaite. De plus, dans l'administration Koizumi, Shinzo Abe était le porte-parole de la ligne dure vis-à-vis de la Corée du Nord. Il a commencé à bâtir sa popularité en 2002, quand il a convaincu le gouvernement de garder au Japon les citoyens japonais enlevés jadis en Corée du Nord, que Koizumi avait ramenés de Pyongyang en promettant de les y renvoyer après un court séjour dans l'archipel pour revoir leurs familles.
Comm