Lubumbashi envoyé spécial
Tout au bout de la longue chaîne du trafic d'armes en Afrique centrale, tout au fond de la brousse, il y a Gédéon. Gédéon Kyungu Kasongo Mutanga de son vrai nom. Pendant des années, «commandant Gédéon» a régné en maître dans le nord de l'immense province du Katanga, au sud-est de la République démocratique du Congo (RDC). Avec ses 2 000 combattants, il a ravagé un vaste triangle autour de Mitwaba, sa ville natale. Gédéon est un chef maï maï, un milicien «irrégulier», comme l'interminable guerre du Congo en a produit des dizaines.
Testicules humains découpés. Au départ, les Maï Maï sont des guerriers traditionnels combattant avec des arcs et pratiquant des rituels magiques comme l'aspersion d'eau (maï en swahili) sacrée censés les rendre invulnérables. Peu sont ceux à avoir vu le visage de Gédéon, qui reçoit la tête recouverte d'un foulard ne laissant entrevoir que la pointe de sa barbe. Il apparaît torse nu, un pantalon en toile raide de crasse, le cou et les poignets entourés de dizaines de fétiches, dont deux testicules humains découpés sur un ennemi et supposés lui garantir l'invincibilité. Agé d'une quarantaine d'années, Gédéon n'est pas inculte : dans une autre vie, il a fait ses «humanités», l'équivalent du bac, et enseigné en français. Aujourd'hui, il ne s'exprime plus qu'en kiluba, pour lancer d'incompréhensibles imprécations magico-bibliques.
Lorsqu'en 1998 des groupes rebelles congolais, soutenus par le Rwanda et l'Ouganda, ont pris le c