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Libération
Interview

«C'est l'impossible rencontre de deux vérités»

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publié le 15 décembre 2006 à 0h31

Denis Salas, magistrat, est maître de conférence à l'Ecole nationale de la magistrature et secrétaire général de l'association pour l'histoire de la justice. Il est l'auteur, avec Antoine Garapon, du livre les Nouvelles Sorcières de Salem : leçons d'Outreau (Seuil 2006).

Pourquoi la décision de la Cour de cassation est-elle si difficile à comprendre ?

Parce qu'elle illustre le décalage entre le mouvement d'opinion et le temps judiciaire. Il y a une inadéquation entre la revendication d'innocence puissamment invoquée par Denis Seznec, soutenue par les médias depuis de très longues années, et le travail de la Cour de cassation. Cette dernière obéit à une logique tout à fait différente qui s'appuie sur l'examen du dossier, des faits, des témoignages. C'est extrêmement compliqué dans une affaire vieille de plus de 80 ans où tous les témoins sont morts et où il est très difficile de retrouver des archives nouvelles. Ce constat illustre l'impossible rencontre entre deux vérités : une vérité mémorielle et une vérité judiciaire. Il y a d'un côté l'innocence de Guillaume Seznec portée par un mouvement d'opinion et de l'autre un travail judiciaire qui doit suivre une logique de preuves.

Pourquoi une telle distorsion entre ce que vous appelez le «mouvement d'opinion» et la justice ?

Denis Seznec a une dette envers son aïeul. Il mène, avec le soutien populaire et médiatique, une quête morale pour la réhabilitation du nom de sa famille. Mais l'institution judiciaire n'est pas engagée