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Libération
Éditorial

Simplicité

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publié le 11 janvier 2007 à 5h24

Ses amis l'appelaient «Jipé» et quand ils parlaient de lui, cela donnait envie d'être l'un d'eux. Jean-Pierre Vernant avait beaucoup réfléchi sur l'amitié. «On se fabrique

soi-même avec ce que sont les autres et on découvre les autres à partir de ce qu'on est soi», disait-il en racontant combien son expérience de la Résistance lui avait appris sur le sujet. Vernant était un juste. Un parcours rectiligne, un engagement qui n'a jamais failli, une recherche d'idéal qui n'a jamais dévié et cette simplicité qui est le lot des plus grands. L'homme avait un goût farouche pour la liberté, la sienne et celle de la Cité. Compagnon de la Libération en 1944, il devient surtout compagnon de la libération des esprits, celle qu'offre la connaissance de soi, de son époque et de ses origines. Comment penser l'avenir sans chercher la clé dans le passé ? Cette recherche du lien, Vernant n'a cessé d'y travailler. Il révolutionne l'hellénisme en pistant l'homme grec et ses mythes anciens pour comprendre le passage de l'Occident à la rationalité. L'épopée d'Homère, les tragédies de Sophocle, autant d'interrogations sur l'homme et le monde, le juste et le vrai, la liberté et le destin qui font écho au présent d'une raison occidentale toujours bousculée par le religieux. Vernant était le conteur formidable du mystère de nos origines intellectuelles. Celles qui se rappellent à nous chaque jour, jusqu'à la présente présidentielle où s'invite une démocratie participative qui prend sa sou