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Libération

Cruel

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publié le 12 mars 2007 à 6h35

Chaque président a son désir d'éternité. Mitterrand avait poussé le sien jusqu'à prétendre demeurer dans la partie : «Je crois aux forces de l'esprit et je ne vous quitterai pas.» Chirac, hier, n'a pas hypothéqué l'au-delà. S'il quitte l'Elysée, il reste sur terre. Il continuera à «servir» mais «autrement» une France qu'il «aime passionnément». Le sortant a beaucoup parlé d'amour, hier soir. Emotion vraie du préretraité, mais façon aussi de masquer les faiblesses de son action. Le costume de président a parfois été un peu grand pour Chirac, qui a d'ailleurs revendiqué peu de choses après douze ans de mandat. Il lui a même fallu enjoliver un peu en parlant d'un «chômage au plus bas». Il a été plus à l'aise sur son testament ­ «Etonnez le monde !» ­ dont le classicisme ne défrisera aucun héritier. Pour garder la vedette, il n'a pas nommé son favori. Mais cela viendra car c'est bien l'identité de son successeur qui dira quel bilan les Français dressent de lui. S'ils désignent Royal, Chirac devra admettre qu'il a surtout alimenté leur désir de changement. S'ils choisissent Bayrou, cela signifiera que, en douze ans, le chef de l'Etat a à ce point abîmé la politique que les gens ne croient plus en rien, ni à la gauche ni à la droite. S'ils élisent Sarkozy, Chirac pourra en déduire que les Français l'applaudissent. Le président de l'UMP est celui qui lui ressemble le plus. Même parcours marqué au fer de la trahison, même discours volontaris