Qu'elle soit ou non couronnée de succès, l'initiative de Ségolène Royal visant à proposer une alliance à François Bayrou illustre le fait qu'un cycle de l'histoire de la gauche tire bel et bien à sa fin, celui qui s'est ouvert en juin 1971 lors du congrès de refondation du PS, à Epinay-sur-Seine. A l'époque, François Mitterrand avait conquis les rênes du PS sur une stratégie jamais démentie depuis : l'union de la gauche. Il en avait fait, à juste titre, le préalable à la conquête du pouvoir dans une Ve République dominée par l'élection du président au suffrage universel. Cette ligne passait principalement par l'alliance avec le PCF et s'appuya même, un temps, sur un programme commun de gouvernement.
Si Ségolène Royal peut aujourd'hui remettre en cause cette stratégie, c'est d'abord parce que ces partenaires situés à la gauche du PS se sont dilués au fond des urnes. La gauche plurielle a disparu. Lorsque le PCF passe, comme les Verts, en dessous de 2 % des voix, les socialistes sont contraints de chercher d'autres alliés pour constituer une majorité au Parlement et former un gouvernement. En mettant le cap au centre, Royal s'inspire, sur le plan stratégique, de la coalition italienne emmenée par Romano Prodi en Italie (lire page 6) et, sur le fond, de la rénovation idéologique conduite par Tony Blair en Grande-Bretagne. Sans se convertir au «blairisme», le projet du PS s'est d'ailleurs réorienté depuis quelques années, notamment sous l'influence de Dominique Strauss-Kahn, sur