Les nuits d'insurrection à Villiers-le-Bel se suivent mais ne se ressemblent pas. Mardi soir, la ville est vide, seules des enfilades de car de CRS à des points stratégiques, les ronds-points qui distribuent les allées et venues entre les cités, les bâtiments publics. Vide mais pas silencieuse. Un hélicoptère balaie son projecteur sur les rues pavillonnaires près de la Cerisaie, sur les immeubles de La ZAC : «C'est à cause de lui que ça ne bouge pas ce soir, confie Bruno, 30 ans. Le but, c'est de faire la guerre à la police, mais pas de se faire attraper, donc de surtout pas d'y aller quand ils sont en surnombre.» A la fenêtre de la voiture, il demande aux quelques adolescents qui traînent sur le parking de rentrer et de se tenir tranquille. En bas de la cité, des parents font de même. Mais ils n'arrivent pas toujours à contrôler tout le monde : «Ils ont brûlé la bibliothèque de notre enfance», se lamente Bruno. Lundi, c'est lui qui nous aidait à traverser à pied le nuage de lacrymogène, la fumée des voitures brûlées, les lignes des CRS et celles des émeutiers.
A l'intérieur de la ZAC, ce sont des trentenaires cagoulés qui préparent les pierres, saluent et repartent à l'assaut. «Il y a toutes les générations dans la rue, constate Bruno. Tout le monde a la rage de la police. Les deux ados qui ont été tués, ça aurait pu être leur fils, leur petit frère.» Comme tous les habitants qui veulent bien témoigner, Bruno ne croit toujours pas à