Historien de la mode, Farid Chenoune a rédigé, il y a deux ans, le catalogue d'une exposition sur le smoking organisée par la Fondation Yves Saint Laurent à Paris.
Comment Yves Saint Laurent a-t-il marqué l'histoire de la mode ?
Yves Saint Laurent poursuit une sorte de beau fantôme fondateur de l'imaginaire de la mode : la Parisienne. Au-delà de l'histoire de ses collections et de son style, il renouvelle ce personnage féminin essentiel, en reprenant le travail de Chanel, là où elle l'avait arrêté.
C'est-à-dire ?
Comme elle, il joue sur les codes du féminin et du masculin mais il va au-delà, en réintroduisant quelque chose de sexy dans la manière de porter le vêtement masculin par les femmes. Là où Chanel avait tendance, avec ses tailleurs, à effacer la sexualité, à la neutraliser, lui souligne le corps des femmes, lui redonne un pouvoir d'attraction. C'est l'invention du smoking dont la veste est portée à même la peau, seins nus. Quand Chanel dessinait des tailleurs jupes, Yves Saint Laurent invente le premier tailleur-pantalon pour femme, le smoking ou la saharienne. La femme Saint Laurent a du chien : elle est élégante et légère, enjouée et sexy, avec une pointe d'arrogance et de provocation.
Yves Saint Laurent avait débuté chez Dior. Que garde-t-il de cet héritage ?
Dior célébrait une hyperféminisation traditionnelle des femmes, avec la taille et les seins mis en valeur, les talons aiguilles. Comme Dior, Yves Saint Laurent glorifie les femmes mais en jouant sur le masculin et