Loin de Wall Street et de ses traders cravatés et muets, incertains du futur qui les attend à l'heure où George Bush implore le Congrès d'adopter son plan de sauvetage des marchés financiers, les New-Yorkais accusent le coup avec colère et résignation. Colère contre des financiers qui se sont enrichis sur leur dos et qu'il faudrait renflouer, colère contre une crise qui finira bien par les affecter, colère enfin contre un gouvernement qui non seulement n'a rien vu venir mais qui a laissé faire.
Quant à ceux qui voudraient penser à autre chose, difficile. Les titres des journaux leur sautent à la figure, dans toutes les langues possibles. «Double défi», écrit le Daily News, «Partie d'échec», surenchérit Oggi, le quotidien en langue italienne, alors que l'Amsterdam News, de Harlem, lacère sa une d'un «Débâcle» sur quatre colonnes.«Tout le monde ne parle que de ça, même si on n'y comprend pas grand-chose», raconte Valérie Hammond, 54 ans, enseignante, dans le minuscule café Abraço sur la 7e Rue dans l'East Village. Elle ne sait pas quoi penser du plan de sauvetage. «Je ne leur fais plus confiance, dit-elle. Au pire, je suis prête à un plan étape par étape, à coup de 100 milliards de dollars, pour voir si ça marche, mais 700 milliards d'un coup, non, c'est trop. Ils ont créé ce bordel et il faudrait leur donner de l'argent comme ça !»
Détritus. A la table d'en face, sur le trottoir, Joe Ulam, 40 ans, écoute d'une oreille attentive. «Je