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Libération
40 ans de faits divers

La tribu Villemin-Jacob enterre Grégory

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Affaire Grégory, une histoire françaisedossier
Portrait d'archives datant de 1984 de Grégory Villemin. (Photo AFP)
publié le 31 janvier 2013 à 13h53


(Paru dans Libé le 22 octobre 1984)

Lépanges-sur-Vologne a enterré son enfant mort. La petite église de ce village des Vosges, à flanc de coteau, était pleine à craquer : 600 ou 700 personnes. Devant, il y avait la très grande famille des Villemin-Jacob en costumes bleus trop larges ou en robes à fleurs. Derrière, s’entassaient les villageois en blue-jeans repassés et en anoraks propres. Dans la masse, s'étaient cachés, tant bien que mal, un député attristé, quelques gendarmes en civil (dont un avait encore, toute fraîche sur le front, la marque de son képi), et puis tous ces journalistes, voyeurs professionnels dont certains, placés au premier rang, jouaient les arrière-petits-cousins.


Martyr

M. le curé a d’abord rendu hommage à la mère en priant Je vous salue Marie et a parlé de la peine des parents de Grégory. Mais pas plus de quinze secondes. Pour le reste, c'était sans doute une messe comme les autres. Devant une étoffe blanche, sur le petit cercueil à roulettes, le regard de Grégory en photo couleur fixait la salle. Riant. Il n’y a presque pas eu de pleurs. Sauf à la fin, quand la mère, Christine, a craqué, déclenchant des sanglots étouffés et des sorties de mouchoirs. M. le curé a parlé «des enfants martyrs et des enfants pauvres» ; il a recommandé de donner, pour eux, une pièce. Ce que presque tout le monde a fait, francs d’argent et sous jaunes.

A Lépanges, on n’est pas avare, mais économe.
 Pendant que les gens tristes défilaient, aspergeant d’eau bénite la