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TRIBUNE

Critiquer (vraiment) Facebook

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Le logo de Facebook (Photo Karen Bleier. AFP)
par Dominique Cardon, sociologue
publié le 19 mars 2013 à 17h54

Facebook est le miroir de nos ambivalences. Et il serait sans doute utile d’être plus lucide à l’égard de nos propres pratiques si l’on voulait rendre cohérentes les multiples critiques que nous adressons aux réseaux sociaux de l’Internet. Un paradoxe, en effet, ne cesse de traverser notre rapport aux nouveaux mondes numériques. Nos représentations et nos pratiques ne sont pas simplement désajustées. Elles font le grand écart.

Nous nous méfions, et ceci de plus en plus, des risques relatifs à la capture de nos données personnelles par les grands acteurs commerciaux du web, mais nous continuons toutefois à nous exposer sans grand scrupule. Nous définissons de plus en plus l’amitié comme une relation pure et désintéressée, mais nous multiplions les contacts opportunistes sur les plateformes relationnelles en appelants «ami» la première personne qui nous clique, nous «like» ou nous «retweete».

De la quête d'authenticité à l'auto-observation

Nous sommes en quête d’expériences authentiques, mais pour les vivre, nous nous auto-observons afin d’en faire le récit sur les réseaux sociaux de l’Internet. Nous fantasmons la vie réelle comme la seule scène de rencontres vraies, mais les outils de communication ne cessent de s’immiscer dans notre vie relationnelle pour la continuer, l’augmenter et l’étendre.

Il y a quelque chose d’incohérent, et d’une incohérence qui se sait elle-même fautive, dans les reproches que nous adressons continuellement aux réseaux sociaux de l’Internet : perte de temps, bavardage, addiction, faux-amis, désordre