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Libération
EDITORIAL

Idéologie

publié le 27 janvier 2015 à 20h06

Une erreur à ne pas commettre quand on parle des jihadistes français comme Amedy Coulibaly : tout ramener à la question sociale. Certes, le jeune homme a grandi non loin de Grigny (Essonne) et du quartier de la Grande Borne, un endroit qui ne prédispose pas à l’intégration sociale. Certes, on repère dans son itinéraire compliqué les moments où une plus grande vigilance, une meilleure organisation de l’aide sociale ou de la vie en prison auraient - peut-être - prévenu sa dérive meurtrière. Mais on remarquera aussi que le jeune délinquant avait trouvé un travail chez Coca-Cola, qu’il a bénéficié de l’intervention de travailleurs sociaux, qu’il passait même des vacances au soleil, en Crète, en Malaisie ou en République dominicaine, où il a rencontré sa compagne, qui portait à l’époque le bikini et non le voile intégral. Pas précisément le profil d’un exclu confiné dans sa cité… D’ailleurs, la majorité des exclus ne deviennent pas des délinquants et encore moins des terroristes. C’est la rencontre, en prison notamment, avec des prêcheurs de l’islam radical qui a été déterminante. Autrement dit, la force autonome de l’Idée, idée folle en l’occurrence, mais idée efficace, qui donne un sens meurtrier à la vie d’un Coulibaly, mais un sens tout de même. La bataille contre le terrorisme est donc politique, religieuse, théologique même, au sein d’un islam partagé entre les lectures modernes et rigoristes, entre ceux qui acceptent l’adaptation à la vie démocratique - la grande majorité fort heureusement - et les autres qui la refusent. En un mot, la misère compte. Mais l’idéologie beaucoup plus.